Ma mère m’a souvent répété que j’étais son petit miracle. Née prématurément à l’hôpital Femme Mère Enfant de Bron, je suis restée deux mois en service néonatal, car j’étais trop faible pour sortir. Deux longs mois pour mes parents, parait-il. Je ne peux qu’imaginer combien cela a pu être dur pour eux. Cependant, de là à croire que c’est l’intervention divine d’une entité toute puissante… personnellement, je n’y crois pas. Et pour ma part, je ne me sens pas redevable envers un quelconque Dieu pour ma survie. Je pense que j’étais tout simplement assez forte pour survivre. Ça, c’est la nature : les faibles meurent et les forts survivent.
Reprenons depuis le début.

         Je m’appelle Mégane. Mégane Joséphine Adélaïde Manenti. Meg pour mes amies. Je suis née il y a de cela 27 ans avec des problèmes cardiaques, dont je garde aujourd’hui encore des séquelles. Ce qui ne m’empêche pas de vivre pleinement ma vie.
Ma famille est l’une des plus croyantes qui soient. Elle attribue donc ma « survie » à un miracle de notre bon Dieu. Chose à laquelle je n’adhère pas au grand damne de mes parents. Je dois reconnaître que je n’ai manqué de rien. Ma petite vie était belle. Je vivais dans une belle maison au bord de la Saône dans le quartier de Croix rousse. Un petit coin de verdure au milieu du béton de la grande ville de Lyon. J’ai eu un grand frère et une petite sœur pour accompagner mes jeux d’enfants. Vraiment, le tableau peut paraître parfait. Un peu trop…

         Il ne se passait pas un seul dimanche sans la messe du matin. Quand on est une enfant, c’est assez dur de rester assise à écouter un discours que vous ne comprenez pas. Lorsque vous êtes adolescente… on ne va pas se mentir, c’est chiant. D’autant plus que je serais volontiers restée faire des grasses matinées. Plus encore, je n’adhérais déjà pas au concept de religion, ce n’est pas plus le cas aujourd’hui. J’ai donc été cantonnée à ces idéaux qui n’étaient pas les miens. Par moment, je voulais crier que je n’en avais strictement rien à faire. Le principe de loyauté vous connaissez ? Et bien pour ma part, cela se résumait à avoir le dilemme entre dire à mes parents d’aller se faire voir ou rester la petite fille sage qu’on attendait que je sois. Pour cela, ma sœur a toujours été bien meilleure… Moi, je finis par opter pour l’option numéro 1.

        Cela se passa lors de mon année à la faculté de médecine. Un parcours pratiquement imposé que choisit. Certes à l’époque je n’avais aucune idée de ce que je voulais faire. Mais médecine ne faisait pas partit des choix que j’aurais faits volontairement. Alors je finis. Par inévitablement décrocher. Et cela aurait pu s’arrêter là. Je suppose que mes parents auraient pu comprendre… du moins, je l’espère. Cependant, je me suis laissé entrainer par mes amis du moment. Fêtes, alcool et même quelques drogues à l’occasion. Je n’ai pas honte. J’étais jeune et je me cherchais moi-même. Et presque vicieusement, j’ai adoré l’effet « rebelle » avec mes parents. Cela fit un bien fou de pouvoir leur dire combien je me moquais de leur fichu Dieu. Combien, à présent majeure je pouvais bien faire ce qu’il me plaisait. J’avoue avoir sans modération été plus qu’insolente. Aujourd’hui encore je le suis, mais un peu plus modérément. Cependant comme une seconde nature, cela est devenu mon mode de fonctionnement. Comme un besoin pour m’exprimer et dire que j’existe pour moi.

J’ai carrément pris la tangente lorsqu’après avoir hérité d’une jolie petite somme d’argent, je pris la décision de partir quelques mois en voyage. J’ai peut-être dilapidé mon argent bêtement, comme diraient mes parents, mais je ne regrette en rien cette décision. Plus que tout, je me suis sentie libre. Et cela fit un bien fou. Et j’ai adoré chaque instant de ce voyage, chaque endroit que j’ai pu visiter. Je recommencerais sans hésiter si c’était à refaire. Et grâce à cela, j’ai pu découvrir ma passion pour la photographie. Et comme un jour il faut bien reprendre le cours de son existence - surtout lorsque l’argent vient à manquer – je finis par suivre une formation de photographie et en parallèle de web designer. Je combine alors les deux, en tant que freelance pour mon second job. Et même si je travaille presque exclusivement pour l’office du tourisme de Lyon. Quant à ma passion pour la photographie, je la mets au service d’un tout nouveau studio qui a ouvert près de Fourvière. J’adore ce que je fais. Mais il me manque encore quelque chose. Quoi je ne saurais le dire. J’espère le trouver.

Qui sait ? Peut-être est-ce dans ce tout nouveau monde obscur qui est sur le point de s’ouvrir à moi ?